Publié le 04/04/2025

L’intelligence artificielle (IA) est un sujet qui fait à la fois rêver et inquiète, particulièrement dans des domaines aussi sensibles que la communication médicale. Dans cet épisode du podcast Effivox, La Voix de la Com’ Santé, Julia Molkhou, a interviewé Erwan Charvot, dirigeant de Dopamine Synergies, ainsi que Marie-Ange Faure et Lucile Manteau de l’agence de communication santé Effiscience, sur l’impact croissant de l’IA dans l’industrie pharmaceutique. Retour sur les enjeux soulevés, les défis à relever et les perspectives qu’offre cette technologie.

Qu’est-ce que l’intelligence artificielle ?

Erwan Charvot introduit la notion d’IA en insistant sur sa définition : « L’intelligence artificielle revient à créer un système logiciel capable de réaliser des tâches normalement attribuées à l’intelligence humaine ». Ce champ vaste comprend des capacités comme le raisonnement, l’apprentissage, l’analyse de données sensorielles et visuelles, ainsi que la prise de décisions à partir de ces informations.

Il distingue deux catégories d’IA :

  • l’IA faible, dont les applications actuelles comme ChatGPT ou Siri ne possèdent qu’un but spécifique,
  • et l’IA générale, qui serait une forme d’intelligence autonome capable de se comprendre et d’apprendre par elle-même, mais qui reste aujourd’hui un objectif à long terme.

Un outil ambivalent

Marie-Ange Faure souligne la fascination mais aussi l’anxiété générée par l’IA, un phénomène observé dans des études récentes, où « une personne sur deux est fascinée par l’IA et une personne sur deux en a peur ». La crainte réside principalement dans l’opacité de ces systèmes, qui restent souvent des boîtes noires, difficilement compréhensibles même pour les experts. Lucile Manteau, quant à elle, évoque un autre aspect de cette dualité : « En agence, l’IA peut être un accélérateur, mais elle ne remplace pas l’expertise humaine. » En effet, si elle peut aider à brainstormer et à générer des idées rapidement, elle reste un outil qui nécessite une vérification constante. L’IA, comme l’explique Erwan, « est un peu comme un stagiaire : il faut toujours vérifier ce qu’elle fournit, car elle peut produire des erreurs. »

L’IA en Com’ Santé

La communication, particulièrement dans le secteur pharmaceutique, est un domaine délicat où l’IA peut à la fois offrir des opportunités mais aussi présenter des risques importants. Marie-Ange met en lumière l’un des avantages de l’IA dans ce contexte : « L’IA peut nous aider à générer des images spécifiques, adaptées à des campagnes de communication santé, là où les banques d’images sont souvent limitées ». Cela permet de créer des visuels qui reflètent plus précisément les réalités de la maladie et des traitements, tout en offrant une approche plus moderne et percutante.

Cependant, la prudence est de mise. Comme le souligne Marie-Ange Faure, « L’IA doit rester un outil au service de l’expertise et non la remplacer. Elle ne doit pas faire croire qu’elle rend les utilisateurs experts ». L’IA excelle dans l’analyse de grandes quantités de données et peut fournir des insights utiles, mais elle manque d’humanité et de nuance, pourtant essentielles dans le domaine de la santé. Ainsi, elle ne doit jamais supplanter les compétences des professionnels de santé ou des communicants qui maîtrisent les spécificités de ce secteur.

Erwan Charvot partage cette opinion, en insistant sur la nécessité de vérifier l’information produite par l’IA, notamment lorsqu’il s’agit de données sensibles : « En tant que professionnel, vous ne devez jamais envoyer des documents confidentiels à une IA. C’est là qu’interviennent les risques de fuite de données, notamment avec des systèmes basés sur des plateformes américaines qui ne sont pas toujours sous contrôle européen. »

L’enjeu majeur que représente le risque de fuite de données

L’une des préoccupations majeures de l’IA en santé est la gestion des données personnelles. « Le fonctionnement de l’IA nécessite un accès à d’énormes sources de données », explique Erwan Charvot. Cela pose un problème éthique et législatif, car les données de santé sont particulièrement sensibles. Le RGPD (Règlement général sur la protection des données) en Europe vise à protéger ces données, mais sa mise en œuvre est complexe, surtout quand il s’agit de réguler des entreprises basées en dehors de l’Europe, comme les GAFAM.

Pour répondre à ces enjeux, Dopamine Synergies a développé un système d’IA qui travaille uniquement avec des sources publiques, garantissant ainsi un cadre de sécurité. « Nous avons créé un outil qui utilise exclusivement des documents légaux et réglementaires, afin de s’assurer que l’information produite est fiable et conforme », précise Erwan. Cette approche permet de limiter les risques tout en offrant un service efficace aux professionnels de la santé.

Conseils pour une utilisation responsable de l’IA

Lorsqu’il s’agit d’intégrer l’IA dans des projets de communication santé, plusieurs recommandations s’imposent. Erwan Charvot conseille avant tout de « maîtriser l’art du prompt ». En effet, « le prompt engineering est un métier d’avenir », précise-t-il. Il s’agit de formuler correctement les requêtes à l’IA pour qu’elles produisent des réponses pertinentes et fiables.

Lucile Manteau, pour sa part, insiste sur l’importance de « vérifier et sourcer » les réponses de l’IA. Cela est d’autant plus important dans le domaine de la santé, où des informations erronées peuvent avoir des conséquences graves.

Marie-Ange Faure souligne à son tour qu’il faut « garder un esprit critique face aux réponses de l’IA » et ne pas trop idéaliser ses capacités. L’IA est un outil puissant, mais elle doit toujours être utilisée sous le contrôle d’experts humains. Il ne faut pas oublier que « l’IA ne rend pas les gens experts, elle les assiste ».

L’intelligence artificielle offre des possibilités intéressantes, toutefois, son utilisation nécessite une vigilance constante. Il est essentiel de maîtriser l’outil, de vérifier l’information qu’elle produit et de respecter des normes éthiques strictes. L’IA ne doit pas être vue comme un remplacement des professionnels mais comme un assistant, à utiliser avec discernement, en particulier dans le domaine sensible de la Com’ Santé où l’expertise humaine reste clé.

Pour découvrir l’interview dans son intégralité : accédez ici à l’épisode N°7 du podcast Effivox, La Voix de la Com’ Santé.