Publié le 11/04/2025

La reprise d’une activité physique après une intervention chirurgicale est une étape importante pour retrouver son autonomie et sa qualité de vie. Pourtant, cette transition est souvent semée d’obstacles : manque d’information, accès restreint à la rééducation, déficit d’accompagnement médical et paramédical. Dans cet épisode du podcast Effivox, La Voix de la Com’ Santé, Julia Molkhou reçoit le docteur Julien Serane, chirurgien orthopédiste spécialisé en chirurgie fonctionnelle, aux côtés de Lucile Manteau, directrice médicale d’Effiscience. Ensemble, ils nous expliquent les défis et les solutions pour mieux accompagner les patients dans leur reprise d’activité.

Un parcours semé d’embûches pour les patients

Julien Serane l’affirme dès le début : « Nos patients ne sont pas « malades », ils viennent nous voir avec une incapacité fonctionnelle : lever le bras, porter un enfant, faire du sport, travailler… » Ce sont donc des problèmes du quotidien qui affectent leur qualité de vie. Cependant, le parcours de soins présente de nombreuses difficultés, notamment en raison des inégalités d’accès aux soins entre les grandes villes et les zones médicalement désertées. Le praticien souligne : « Je travaille à Paris et à Compiègne. Compiègne est un vrai désert médical : les patients ont du mal à nous voir, à faire leurs examens et à accéder à la rééducation. »

Outre l’accès aux soins, un autre frein est la compréhension des patients face à l’importance de l’activité physique dans leur récupération. Lucile Manteau explique : « Notre rôle est de créer un déclic et d’accompagner au mieux les patients dans cette reprise d’activité. » Pour cela, une bonne communication est primordiale.

Le rôle de la communication médicale

Les patients ne retiennent en moyenne que 25% des informations reçues en consultation. D’où l’importance des supports de communication. « Quand un patient sort du cabinet, il a déjà oublié les trois quarts de ce qu’on lui a dit. On le voit quand notre secrétaire reçoit des appels pour répéter des informations de base », explique Julien Serane.

Lucile Manteau insiste sur la nécessité d’outils adaptés : brochures, affiches en salle d’attente, supports numériques. « On travaille avec nos clients pour créer des outils qui permettent aux médecins de mieux accompagner leurs patients. » La communication médicale devient ainsi un levier essentiel pour favoriser l’observance et améliorer la récupération post-opératoire.

La prescription médicale du sport reste encore un dispositif à améliorer

Depuis plusieurs années, la prescription d’activité physique adaptée (APA) est encouragée pour les patients en affection de longue durée (ALD). Cependant, ce dispositif présente encore des limites. « Le paradoxe, c’est que l’APA n’est pas remboursée par la Sécurité sociale, ce qui la rend inaccessible pour une grande partie de la population », regrette Julien Serane.

Faute de prise en charge, certains professionnels de santé trouvent des solutions alternatives en adaptant leurs prescriptions. « Les kinés, par exemple, intègrent la remise en forme dans une prescription de rééducation fonctionnelle, ce qui leur permet de contourner les limites du système », précise le chirurgien. Une évolution du financement et de l’organisation de ces dispositifs semble donc essentielle pour rendre l’activité physique post-opératoire accessible à tous.

L’avenir de l’activité physique post-opératoire : des solutions à inventer

Pour Julien Serane, l’avenir de la reprise d’activité physique repose sur plusieurs leviers : améliorer la formation et le recrutement de spécialistes (médecins du sport, kinés, rééducateurs), développer des centres spécialisés et utiliser les nouvelles technologies. « On manque de praticiens formés à la rééducation et à la médecine du sport. Il faudrait que chaque patient opéré ait accès à un kiné deux fois par semaine, ce qui est loin d’être le cas aujourd’hui », constate-t-il.

Les réseaux sociaux et les outils digitaux offrent également des perspectives intéressantes. « On voit émerger des contenus spécialisés sur la rééducation post-opératoire, créés par des professionnels. C’est un outil formidable, à condition de bien s’en servir et d’éviter les dérives. » Cette numérisation de l’information pourrait permettre de toucher un plus large public et de mieux informer les patients sur les bonnes pratiques.

L’activité physique post-opératoire est un enjeu majeur de santé publique, mais elle nécessite un accompagnement adapté. Pour Julien Serane et Lucile Manteau, la clef réside dans une meilleure coordination entre les acteurs de la santé, une communication efficace et une adaptation des dispositifs de prise en charge. Comme le souligne le chirurgien : « Il faut créer des vocations, motiver les jeunes à embrasser ces carrières essentielles, mais aussi repenser l’organisation des soins pour garantir à chaque patient un accès à une rééducation de qualité. »

Une démarche qui passe à la fois par des réformes structurelles et une communication médicale efficace pour sensibiliser les patients et les encourager à reprendre une activité physique en toute sécurité.

Pour découvrir l’interview dans son intégralité : accédez ici à l’épisode N°10 du podcast Effivox, La Voix de la Com’ Santé.